Découvrir une intolérance au gluten chez son enfant implique un important bouleversement. Le quotidien à la maison, l’école, les sorties : tout nécessite une rigoureuse organisation… Le point avec Brigitte Jolivet, présidente de l’Association Française Des Intolérants Au Gluten (Afdiag).
Au quotidien, dans le cercle familial
Brigitte Jolivet a rencontré deux principaux types de gestion familiale d’un enfant cœliaque à la maison.
Dans un grand nombre de foyers, toute la famille se convertit au régime sans gluten afin de simplifier la préparation des repas et d’éviter de mettre l’enfant trop à l’écart. Cette décision présente toutefois un certain coût, les produits sans gluten du commerce étant rarement bon marché.
D’autres familles décident au contraire de différencier les repas. Ainsi, l’enfant intolérant au gluten s’habitue à manger des produits spécifiques, à l’aspect particulier. « Il prend peu à peu conscience que les produits conventionnels ne sont pas bons pour lui », souligne la présidente de l’Afdiag. L’inconvénient de cette solution réside évidemment dans la gestion de repas différenciés. Cependant, avec un peu d’expérience et d’astuce, il est possible de simplifier la cuisine avec un plat de viande ou poisson accompagné de pâtes cuites à part (spaghetti riz-maïs pour l’enfant cœliaque, classiques pour le reste de famille) ou de prévoir deux pâtes à pizza différentes, grâce au Mix’Pizza Bio, garnies des mêmes ingrédients.
Dans les deux cas, il est délicat de trouver le juste milieu entre la responsabilisation de l’enfant, en l’habituant à la vigilance, et la dédramatisation des éventuels écarts. « Sachant que cette maladie est pour la vie, il y aura tôt ou tard des erreurs. Il est nécessaire que les parents intègrent qu’elles ne seront pas fatales » comme cela peut être le cas dans une allergie « et évitent de culpabiliser l’enfant ». Néanmoins, ce dernier doit comprendre l’importance d’en faire le moins possible pour préserver sa santé. « Certains parents sont très angoissés et construisent la vie de la famille autour de la maladie au risque d’induire des tensions au sein de la fratrie avec un enfant cœliaque « roi » », complète B. Jolivet.
A l’école
Trouver sa place à l’école pour un enfant intolérant au gluten est une tâche parfois délicate.
Ainsi, la cantine n’est pas un service obligatoire mais une prestation proposée par les municipalités. Aucune loi n’oblige les collectivités à accueillir les enfants souffrant d’allergies ou d’intolérances alimentaires.
C’est pourquoi la famille peut demander un projet d’accueil individualisé (PAI). Cette démarche permet de fournir les informations médicales indispensables ainsi que des recommandations pratiques pour les repas de l’enfant cœliaque. « Le PAI implique différents acteurs : les parents et l’enfant bien sûr mais aussi le directeur de l’école, le personnel qui suit l’enfant au cours de la journée, le médecin et/ou l’infirmière de l’Éducation Nationale et le médecin traitant », précise B. Jolivet. « Cela permet de prévenir les parents en cas d’écarts ou de problèmes à l’école ».
Selon le type de restauration à l’école, le PAI peut déboucher sur un repas préparé sur place pour l’enfant cœliaque ou l’apport d’un panier-repas.
Ainsi, lorsque les repas sont cuisinés au sein de la cantine, le personnel peut accepter d’adapter les menus à une intolérance au gluten. « Le dialogue et la formation sont alors primordiaux », souligne B. Jolivet , « il faut faire attention aux moindres détails comme la composition des sauces ou l’utilisation d’ustensiles spécifiques ». Les parents peuvent être amenés à fournir les produits spécifiques au régime de leur enfant (par exemple, des pâtes sans gluten).
Quand la préparation d’un repas spécifique sur place est inenvisageable, les parents doivent prévoir un panier-repas sans gluten. « Cela nécessite la présence d’un réfrigérateur et d’un four à micro-ondes, si possible indépendant, pour stocker et réchauffer le repas ». Équiper ainsi la cantine s’avère plus facile lorsque plusieurs enfants de l’école ont des alimentations spécifiques (allergies ou autre). B. Jolivet conseille de « bien emballer les aliments afin de les protéger des contaminations et d’essayer de se procurer les menus à venir si les parents souhaitent préparer des plats similaires ».
Elle prévient également que « l’adolescence peut être un cap complexe. Certains jeunes ne veulent plus se différencier, pensant qu’il est mal vu d’apporter ses repas ». La restauration scolaire se présentant souvent sous forme de self au collège et au lycée, l’adolescent peut avoir plus de latitude pour faire ses choix. « Attention toutefois à l’équilibre du dîner si le jeune ne trouve pas de quoi se nourrir correctement le midi ! » recommande la présidente de l’Afdiag.
En accord avec l’équipe enseignante, « certains parents d’enfant cœliaque organisent parfois des ateliers gâteau sans gluten dans la classe. Cela permet aux autres enfants ainsi qu’à l’encadrement de découvrir ludiquement une préparation sans gluten. » ajoute B. Jolivet. L’actuelle disponibilité de produits sans gluten relativement élaborés permet d’obtenir des saveurs proches des produits classiques et ainsi de limiter les réactions défavorables des autres enfants à la dégustation.
Dans le domaine extrascolaire
Centre aéré, colonie de vacances, stage sportif : les événements extrascolaires constituent des situations à risque pour l’enfant cœliaque. « Il est important de contacter les lieux d’hébergement afin de s’assurer de la gestion correcte des repas une fois sur place. Il arrive parfois que l’enfant intolérant au gluten ne puisse pas partir en raison d’une structure d’accueil peu adaptée. », insiste B. Jolivet.
Rappelons que l’Afdiag organise depuis une vingtaine d’années des stages d’éducation nutritionnelle d’une semaine :
- en été pour les 13-17 ans
- à la Toussaint pour les 9-12 ans ainsi que les familles, les adultes seuls ou en couple.
« Ces stages permettent d’aborder la maladie cœliaque en dehors du cadre familial ou du cabinet médical. Il s’agit d’un partage d’expérience avec d’autres enfants, sans culpabilité ni jugement. », explique B. Jolivet. Les jeunes en repartent bien informés et moins isolés. Certains remarquent même avec surprise « qu’ils n’ont besoin pour cette sortie que d’une seule valise (de vêtements). D’habitude, il faut en prévoir une seconde, remplie de pains et gâteaux sans gluten ! ».
En conclusion, il peut être d’un grand soutien d’adhérer à l’Afdiag lorsque l’on a un enfant cœliaque à la maison. L’association permet de rencontrer des familles dans la même situation et d’obtenir un grand nombre d’informations ou conseils pertinents tels qu’une petite carte personnalisée ou un dessin animé très bien construit pour expliquer la maladie.